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Numéro 10- Novembre 2004
Notre revue mensuelle de l'information positive sur le web… et ailleurs

En 2005, année internationale du micro-crédit, on ne prêtera pas qu'aux riches
"Les exclus ont la tête pleine d’idées, mais leur force de travail et leur esprit d’entreprise sont rendues stériles par manque d’accès au capital" : une conviction que défend Maria Nowak, présidente du Réseau européen de Microfinance et fondatrice de l'Adie (l’Association pour le Droit à l’Initiative Economique). Depuis sa création en 1988, l'Adie aide ainsi des personnes exclues du marché du travail et du système bancaire classique à créer leur entreprise… et leur emploi ! L'association fonctionne sur le principe du micro-crédit, un système de prêts à faible montant et à court terme qui permet aux exclus du système bancaire d'avoir accès au capital et de s'en sortir par leurs propres moyens. Le micro-crédit a été inventé en 1983, au Bangladesh, par l'universitaire Mohammed Yunus, devenu célèbre pour avoir créé la première "banque des pauvres" : la Grameen Bank. Depuis, de nombreuses "banques de l'espoir" ont vu le jour comme le Crédit rural en Guinée-Conakry, les Caisses villageoises au Mali, etc. Mais bien que né dans les pays du Sud, le micro-crédit s'est également développé dans les pays industrialisés d'Europe et d'Amérique du Nord, qui ne sont pas épargnés par la pauvreté et l'exclusion.
Signe révélateur de l'efficacité et du succès du micro-crédit : présente sur tout le territoire français, l’Adie compte à son actif 28 000 emplois et 25 000 entreprises, dont la moitié créées par d’anciens chômeurs ou RMIstes. Affichant un taux de remboursement de 94%, meilleur que celui des grandes banques, et un excellent taux de survie de « ses » entreprises, l’Adie a prouvé qu’un petit capital de départ (5000 € maximum sur 2 ans) et un accompagnement adéquat (comptabilité, gestion, marketing, etc.), pouvaient aider un individu à s’en sortir par ses propres moyens.
Mais si le micro-crédit fait partie des solutions concrètes pour répondre aux objectifs de réduction de la pauvreté et de la faim dans le monde, des freins structurels limitent encore son développement : poids des cotisations sociales, plafond du taux d’usure, complexité administrative de la création d'entreprise, etc. Pourtant, l'enjeu est important : trois milliards d'êtres humains sur la planète vivent avec moins de deux dollars par jour, et on estime que le micro-crédit ne concerne aujourd'hui que de 55 à 60 millions de démunis.
Pour faire avancer les choses, l'ONU a annoncé le 18 novembre dernier que 2005 serait 'l''Année Internationale du Micro-crédit" : un appel à la mobilisation qui devrait aussi contribuer à "obtenir des moyens de financement plus importants et des réglementations plus favorables de la part des gouvernements", souligne Marie Nowak.
Pour en savoir plus :
www.adie.org
www.microcredit2005.org
www.grameen-info.org

Eden Project : écologique et pédagogique, un projet colossal aux pieds d'argile
Ouvert en mars 2001, en Cornouailles, l’Eden Project (littéralement : projet paradis) est un projet pédagogique unique en son genre : construit pour un budget de 86 millions de livres sur une ancienne carrière d’argile désaffectée de 15 hectares de large et de 60 mètres de profondeur, ce jardin a été créé pour sensibiliser ses visiteurs (5 millions de personnes depuis l’ouverture et près de 300 écoliers par jour) à l’écologie, et plus spécifiquement à l’interdépendance entre les Hommes et les plantes. Près de 4 heures sont nécessaires pour visiter tout le site, principalement composé de deux dômes qui sont aussi les deux plus grands conservatoires au monde : le premier, haut de 50 mètres, reconstitue le climat des zones tropicales et héberge une végétation variée issue d’Amérique latine, d’Afrique ou de Malaisie (on y apprend notamment comment les vertus de certaines espèces locales sont utilisées dans des produits quotidiens et pourquoi il faut les protéger) ; le second, qui culmine à 35 mètres, reconstitue la végétation des climats tempérés chauds que l’on trouve en Méditerranée, en Afrique du Sud ou en Californie (on y voit des expériences nouvelles et écologiques de coton teint naturellement, pendant la culture). Un troisième espace en plein air raconte, au fil des terrasses en croissants, l’histoire de plantes qui poussent dans nos climats tempérés comme le chanvre, le tournesol voire même le thé : autant d’espèces qui ont changé le monde et pourrait bien nous aider à l’avenir à construire un monde meilleur…Plus généralement, le site est riche en parterres d’herbes et de fleurs qui accueillent également, tous les soirs d’été, des spectacles, des concerts, etc.
Géré par une fondation qui porte son nom, l’Eden Project emploie désormais plusieurs centaines de salariés, dont 95% sont issus des villages alentours. Elu entrepreneur social de l’année en 2001, le fondateur de l’Eden Project, Tim Smit, s’est lancé dans cette aventure à 50 ans, après des études d’archéologie et un long détour par la musique (il a produit des artistes comme Barry Manilow, qui lui ont valu plusieurs disques d’or). Pour lui, l’Eden Project est le symbole de ce que peut faire la créativité humaine quand elle entreprend de faire revivre une zone sinistrée, socialement et écologiquement. Et les chiffres lui donnent raison : les études indépendantes d’impact économique montrent que le site a d’ores et déjà apporté, durant ses deux premières années d’exploitation, plus de 300 millions de livres à l’économie locale de Cornouailles.
Pour en savoir plus : www.edenproject.com

Time Dollar : de l'économie de l'argent à l'économie de l'amour
Time Dollar a été créé en 1980 par Edgar Cahn, un avocat ami de Ralph Nader qui a travaillé avec Robert Kennedy dans les années 60 sur des causes comme les droits des Amérindiens, la lutte contre la malnutrition aux Etats-Unis ou encore l’accès à la justice pour les pauvres. L'idée qui fonde Time Dollar est aussi simple que révolutionnaire : l’économie de marché, fondée sur la rareté, dévalorise ce qui est universel, comme l'amour ou la solidarité - et va à l’encontre du progrès social, puisque le PIB augmente avec les marées noires ou la criminalité, qui génèrent de l’activité économique. Pour Edgar Cahn, "les indicateurs économiques enregistrent de la croissance quand nous construisons des maisons de retraite et des prisons, plus il y a de résidents dans ces établissements, plus il y a de croissance. Inversement, on ne retient pas comme facteur de croissance économique le fait que les seniors restent chez eux de façon autonome, ou que les prisons soient en sous-effectif. De même, chaque divorce, qui implique le recours à deux avocats, représente un facteur de croissance, mais pas le fait de préserver un mariage… Nous devons redéfinir la croissance et la valeur des choses. Car
la vraie richesse d'une société n'est pas l'argent, ce sont les gens" . Pour le prouver, il a donc créé le Time Dollar, une "monnaie" alternative qui rémunère le temps passé sur des tâches essentielles mais non valorisées par l'économie de marché : s’occuper des enfants ou des personnes âgées, faire du soutien scolaire, assurer la sécurité d’un quartier…Les Time Dollars servent ensuite à "acheter" des produits ou services utiles, allant de la nourriture à l'ordinateur. Au passage, les Time Dollars redonnent de la valeur à la contribution des femmes, des enfants, des familles ou des minorités ethniques : l'économie de l'amour ne connaît ni discrimination, ni subordination ou exploitation.
Ainsi, à Washington, sa ville natale, Edgar Cahn a travaillé avec la police locale pour créer des jurys de jeunes délinquants qui écoutent et « jugent » leurs pairs coupables de délits mineurs, les condamnent à des petits travaux d’utilité collective et se familiarisent avec la loi… tout en gagnant des Time Dollars. A Baltimore, les habitants des logements sociaux payent une partie de leur loyer en Time Dollars, gagnés en participant par exemple à du soutien scolaire ou à des patrouilles pour prévenir l’insécurité dans leur quartier. A Chicago, un millier d’étudiants, en échec scolaire, gagnent des Time Dollar en servant de tuteurs à leurs cadets… un système qui améliore les résultats de tous ! Et à Brooklyn, enfin, une mutuelle propose des Time Dollars aux personnes âgées qui en aident d’autres, ce qui fait retrouver à tous l’autonomie et le goût de vivre. "L'intérêt, c'est qu'il n'y a plus de dépendance mais de la réciprocité", précise Edgar Cahn, "ce n'est plus "J'ai besoin d'aide" mais plutôt "nous avons besoin l'un de l'autre"."
L’idée révolutionnaire d’Edgar Cahn a fait son chemin : à 70 ans, il voyage et enseigne sans relâche de l’Angleterre à la Chine ou à la Slovaquie…
Pour en savoir plus : www.timedollar.org

Stonyfield Farm invente le yaourt militant
Créée en 1983, Stonyfield Farm est spécialisée dans les produits laitiers issus de l’agriculture biologique. Pour Gary Hirschberg son fondateur, qui se dit lui-même écologiste et atteint d'un "optimisme pathologique", le bio est la meilleure façon de prendre soin de l’environnement mais aussi de la santé des consommateurs. Une conviction qui a fait son succès puisque Stonyfield est devenu le quatrième fabriquant de yaourts aux Etats-Unis et la première marque de yaourts bio avec un chiffre d’affaires de plus de 150 M$ en 2003. La réputation de la marque est donc solidement fondée sur son engagement environnemental, à la fois du côté industriel (90% des ingrédients sont certifiés bio, 75% des déchets de fabrication sont recyclés, l’usine est certifiée "carbon neutral" car elle compense ses émissions de CO2 qui ont d'ailleurs été réduites de 41% à production constante depuis 1995, …) mais aussi et surtout du côté marketing. Ainsi, les couvercles des yaourts servent depuis le début de supports aux campagnes d’information et de sensibilisation du grand public sur des sujets d’intérêt général. Par exemple, il y a quelques années, Stonyfield s’est lancée dans une grande ville américaine avec une originale campagne de sensibilisation sur le CO2 : le matin, la marque offrait aux personnes se rendant au travail en voiture un yaourt ainsi que le contrôle gratuit de la pression de leurs pneus pour les aider à consommer moins d’essence et à émettre moins de CO2… Naturellement, ceux qui prenaient les transports en commun avaient aussi droit à un yaourt gratuit pour les féliciter d’avoir choisi un moyen de transport « vert ». Dans le même esprit, les publicités expliquent avec humour pourquoi la marque refuse l’utilisation d’hormones de croissance bovine dans la production de lait. Présente sur tous les fronts, Stonyfield a également mis en place des distributeurs automatiques de nourriture saine dans les écoles, sous le slogan "menu for change", pour lutter contre l’obésité des enfants et les inciter à mieux manger. Enfin, 10% des profits de l’entreprise sont reversés à des causes sociales ou environnementales.
Le succès de Stonyfield depuis quelques années a attiré l’attention du groupe Danone, qui a fini par racheter l’entreprise il y a trois ans, en garantissant à Gary Hirschberg qu’il resterait à la tête de son entreprise. Celui-ci n’a accepté que parce que, de son propre aveu, il s’estime ainsi mieux placé pour avoir encore plus d’impact en changeant "de l’intérieur" le groupe Danone …
Pour en savoir plus : www.stonyfield.com

Les tee-shirts éthiques d'American Apparel débarquent en France
American Apparel, la première marque de textile "sweatshop free" (littéralement : sans atelier à sueur), s'installe à Paris. Elle a été créée aux Etats-Unis en 1998 par Dov Charney, un canadien basé à Los Angeles, en réaction aux grandes manifestations anti-mondialistes contre, justement, les délocalisations et les "sweatshops". L'idée initiale était de prouver qu'on peut être rentable dans le secteur du textile sans pour autant tirer vers le bas les salaires et les conditions de travail des ouvriers. Les vêtements sont donc fabriqués aux Etats-Unis, dans le centre-ville sinistré de Los Angeles où toute la chaîne de production, à l’exception de la teinturerie, est concentrée. Les employés, pour la plupart d'origine hispanique, bénéficient de contrats à durée indéterminée, de salaires supérieurs au salaire minimumlocal, d'une bonne couverture sociale, d'avantages sociaux inhabituels dans l'industrie (allant des cours d'anglais aux massages), et les horaires sont raisonnables. Pour son fondateur, American Apparel "pratique l'activisme social pour prospérer" : une recette qui a fait ses preuves, puisqu'American Apparel est devenue l'un des principaux producteurs de T-shirts aux Etats-Unis, avec près de 3 000 salariés.
Mais loin de se contenter de ces succès, American Apparel fait progresser son engagement au fil des ans. Elle s'est notamment lancée dans le coton recyclé : alliée à un groupe de recyclage basé à Oklahoma, Environmental Textiles, elle espère ainsi recycler une grosse partie des chutes de coton issues de la découpe de ses tee-shirts (plus de 13 tonnes de "chutes" étaient jusqu'à présent mises en décharge chaque semaine). Depuis quelques années, elle propose également une gamme certifiée en coton biologique, avec l'ambition d'utiliser dans quelques années 80% de coton bio.
American Apparel souhaite maintenant proposer aux consommateurs européens ses tee-shirts et autres vêtements "basiques", au design simple, sans marque ni logo ou slogan. Après Francfort et Berlin, elle s'installe à Paris avec une boutique qui ouvrira ses portes le 15 décembre prochain dans le 1er arrondissement (au 31 place du Marché Saint-Honoré).
Pour en savoir plus : www.americanapparel.net




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